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Culture - Page 19

  • Une nouvelle saison, un dernier hommage

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    Jeudi 11 septembre 2014, Nino d'Introna ouvrait les portes du TNG pour présenter la nouvelle saison 2014-2015. Saison qui ne sera pas comme les autres pour le directeur, car elle signe les adieux à dix années de travail passionné, et d'émerveillement pour nous public.

    La festivité est à l'honneur, nous sommes d'emblée accueillis dans la salle par une coupe symbolique où résonnent tours à tours les bouchons de bouteilles aux fines bulles. Nous levons notre verre à ce géant de la scène maniant les cartes d'acteur, metteur en scène, auteur, dramaturge et scénographe, d'une simplicité déroutante lorsque l'on réalise l'étendue de son parcours depuis son pays natal qu'est l'Italie jusqu'au terme de sa mission au TNG à Lyon. Un regard empli de bonté rare et un accent chaleureux, Nino d'Introna est une personne bien à part. Plus qu'une personne, il est une personnalité, de celles que l'on ne croise que quelques fois dans sa vie, professionnelle ou privée.

    Au fil de la soirée se succèdent différents acteurs clés du théatre : collègues, comédiens, chanteur lyrique, musicien, les interventions sont orchestrées selon l'ordre des pièces présentées par une courte bande annonce qui se démarque à chaque fois de la précédente. A l'affiche, nous retrouvons des classiques revisités qui sont les suivants : La Carriole Fantasque de Monsieur Vivaldi, Quand on parle du loup basé sur le conte Le petit Chaperon Rouge, et le mythique Macbeth. L'équipe nous offre également des perles qui ont retennue mon attention et qui feront probablement office de critiques ici même qui sont La Maison près du lac et Yael Tautavel, ou l'enfance de l'art cette dernière détenant le record du nombre de représentations, autant dire une des pièces maîtresses de cette nouvelle saison  à découvrir ou à revoir pour les plus nostalgiques.

    La nostalgie. Elle embaume subtilement la salle tout au long de ces deux heures et trente minutes. L'émotion de Monsieur d'Introna est palpable et nous décroche un sourire de bienveillance quant à la suite de sa carrière. Il nous dit alors ces mots, chargés d'une rétrospective personnelle : 

    "En Afrique, les conteur parvient au terme de son histoire, il appuie la paume de sa main sur la terre et il dit : je dépose mon histoire ici. Puis après un court silence il ajoute : afin que quelqu'un d'autre puisse la reprendre un jour".

    La notion de l'éphémère qui passe cependant de mains en mains est la traduction de la charte graphique des affiches de la nouvelle saison: un tableau noir, et de la craie. La craie tourne, virevolte, prend des chemins singuliers, et intègre un élément phare de la pièce concernée. Imaginer, effacer, retravailler, ce sont les bases de la création artistique. De petites touches de couleurs parsèment l'ensemble de la plaquette, qui s'introduisent sur le tableau et suivent le chemin de la craie pour créer un dessin harmonieux. Mais l'éphémère, n'est-ce pas réduire un moment à la seule durée de son existence ? Car bien que les pièces de Nino d'Introna soient éphémères, car d'une durée d'environ 60 minutes, elles perdurent dans le temps et prennent une place dans notre mémoire, certaines pour quelques semaines, d'autres dont des bribes restent à jamais. Le parcours de Nino d'Introna représente 10 années. Et après décembre 2014, date officielle de son départ, nous y repenserons encore. Nous repenserons à cette soirée, à ces yeux pleins d'énergie et d'amour, à cette main, encadrée par des faisceaux de lumières. Ce jeudi 11 septembre, deux passions communes nous réunissait : le théâtre et le bonheur de partager.

    Merci Monsieur d'Introna pour le merveilleux travail que vous avez fourni.

    Merci pour ces beaux souvenirs et ceux que vous me réservez encore jusqu'à décembre 2014.

     

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    Portrait de Cyrille Sabatier

  • Les oiseaux ne chantent plus

    Essai

    J'ai toujours eu une attirance envers la douleur. Petit garçon, je m'amusais à coller furtivement ma langue contre la pile de la télécommande de chez mémé, confortablement installé dans son clic clac des années 90, aux tâches de café séchées par le temps et à l'odeur indescriptible de personne âgée. Cela apportait quelques couleurs aux émissions soporifiques des dimanches après-midi. J'avais 6 ans. Ce fut le début d'expériences tout aussi bêtes que dangereuses : tester les fils électriques sous hautes tension, escalader à mains nues les falaises qui longeaient l'unique route de ma maison de vacances, peignant mes paumes d'un violet nuancé dans lequel je trouvais une certaine forme d'art et de satisfaction. Avec la quinzaine arrivèrent les premiers tatouages à l'ancre de chine aujourd'hui bavures noires et illisibles retraçant une amourette adolescente et l'essai de quelques dessins tribaux sans grande originalité. Il va s'en dire que je n'étais pas le plus tendre à la cour de récrée. Des problèmes, on m'a a cherché peu, des poings, il s'en est distribué des centaines. Je me délectais de la sensation de mes phalanges qui s'éclatent d'un son roque et puissant contre la joue rose d'un benêt trop prétentieux. Il m'en fallait plus. Mais je devais jouer dans la subtilité, pour ne pas finir marginal ou bien cloîtré entre quatre murs.

    C'est donc tout naturellement que je suis tombé amoureux de Mathilde, jeunette blonde foncée aux quelques tâches de rousseur, la vingtaine superbe, qui m’entraîna dans les profondeurs de son foutu univers. Les débuts furent très difficiles. Nous nous gavions de dîners aux chandelles, nous saoulions de soirées mondaines, et rencontrer ses amis était l'assurance d'une personne de plus sur terre à mépriser. Nous déblatérerions des mots d'amours et des surnoms ridicules à concurrencer le gang des demoiselles naïves de ce cher Walt qui s’éprennent du premier venu dès lors que coule en lui un sang royal. A vomir. Puis notre relation s'est peu à peu améliorée. J'alimentais mon monstre intérieur d'insultes et de bagarres puériles, qui, se cognant contre mes tympans, adoucissait la tempête de mon esprit. Mais  je revenais toujours à la charge. Je recommençais à fréquenter la source de mon malheur, celle qui me coupait le souffle et me retenait, par ses griffes peintes de rose, dans une histoire vouée à ma destruction. C'était donc ça, ce sentiment avec un grand A qui obnubile nos conversations, nos écrans télévisés, nos romans à succès ? Mais je ne voulais pas de tout ça, de toute cette mascarade hollywoodienne.

    Je voulais sentir.

    La douleur de ressentir une caresse, la douceur d'éprouver un coup.

  • Les festivals

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    La musique fait le bonheur des hommes depuis des siècles. Elle est pour certains une passion, pour d'autres un passe-temps agréable, certains ont la chance d'en vivre et elle est utile parfois pour l'assurance d'une soirée sans blancs. Mais son plus grand pouvoir est d'être fédératrice, d'unir ses auditeurs et de créer une veritable cohésion de groupe comme on peut le retrouver dans les troupes de théâtre. Et cela se ressent particulièrement dans les festivals. 

    Un festival est par définition un événement musical qui réunit sur plusieurs jours de nombreux artistes, connus ou moins connus. On peut croiser des personnes novatrices en la matière, qui portent des chaussures ouvertes et une tenue un peu trop propre, des hippies, dreadlocks tombant le long du dos, des costumés arborant des tenues complètes de zèbres, cochons, panda, ressemblant étroitement aux grenouillères de notre tendre enfance, puis des personnes normales, que la mode actuelle se plait à catégoriser de normcore pour se satisfaire d'une catégorie de personnes de plus à classifier. Tous ces styles réunis sous les mêmes chapiteaux, près des mêmes enceintes, à respirer les mêmes effluves parfois aromatisées, jusqu'aux corps qui fusionneraient presque. La foule qui tient corps grâce à la musique déclenche une solidarité à toute épreuve, d'un coup de main réactif à un malaise ou une personne qui tituberait sous un mouvement de foule trop intense, ou bien si une chaussure se perd, une personne la brandira pour trouver son propriétaire, si un autre semble s'ennuyer, c'est bras dessus bras dessous qu'un compère lui redonnera le sourire. Si je devais donner un mot qui résumerait ces moments d'euphories, c'est le mot respect. Respect de la différence, des artistes, de ceux qui n'ont pas juste besoin de bière pour faire la fête, de ceux qui ne dansent pas ou qui dansent trop. A la manière d'une cuisine épicée, nous bouillonnons sous le même ciel, en se colorant les uns les autres de nos différences. Le respect, la tolérance, sont finalement dans ces lieux là le moyen de faire des rencontres uniques, d'échanger avec une autre culture, d'autres idéaux, qui ne nous sont pas familiers. Nous sommes en pause et ne pensons plus à rien de négatif durant ces 24, 48, 72 heures d'éveil intense, sous un son qu'on apprécie et que l'on partage autant avec des personnes qu'on connait depuis plusieurs années que celles qu'on a croisé il y a cinq minutes. Au détour d'une cigarette, au détour d'une conversation, d'un rassemblement, d'un moment de détente sur l'herbe, de connaissance par le biais d'amis en commun, au détour d'un festival, nous vivons dans une harmonie sociale qui ne nous laissera pas indemne pour les quelques jours qui suivront.