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Culture - Page 22

  • Exposition Human Bodies, Barcelone

     

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    Après plusieurs semaines à Barcelone, échangeant la casquette de la parfaite touriste avec celle de la stagiaire en communication, j'ai décidé de renouer avec la culture. Si on admet toutefois que les tapas sont liés à la culture espagnole, alors je suis une élève très impliquée.

    Au coeur de la Plaza del toro, mythique pour ses corridas d'antan, se trouve le lieu de cette exposition singulière. Dès l'entrée, nous sommes avertis "tout ce que vous voyez est réel". L'ensemble des façades des pièces est recouverte de noir, est-ce pour nous porter au coeur du sujet, dans les entrailles d'un corps humain ? Nous découvrons des corps musculeux incroyablement conservés, à qui on a attribué une passion sportive, une expression faciale, ou que l'on a soigneusement découpé. Cela intrigue davantage que cela n'outre : ces personnes qui ont donné leur corps à la science ont-elles choisi de renaître encerclées de vitres ou sous les appareils photos des touristes ? Mais il y a également une thématique forte dans cette exposition : nous sommes, sous nos traits qui nous appartiennent, notre couleur de peau, notre sexe, notre âge, composés des mêmes muscles, d'organes et de cellules similaires. Une exposition qui sert possiblement d'échos aux polémiques actuelles en Espagne concernant les droits de chacun. 

    L'exposition met donc en parallèle notre cycle de vie et notre décomposition. Par exemple, un homme à qui il ne manque qu'une fine couche d'épiderme tient un squelette mains dans la mains et bras tendus. Serait-ce le miroir de sa propre existence ? Une idéologie qui résiderait en l'acceptation de notre finitude ? Accueillir notre mort est donc considérer notre propre vie et s'épanouir davantage. Une fois disséqués, reste-t-il quelque chose de notre passé ? Cela nous montre également qu'il nous faut prendre soin de notre corps, toutes nos actions négatives affectent ce qui nous est invisible et pourtant vital.

    Il va sans dire que cette exposition ravira les amateurs du fonctionnement du corps humain, qui, à l'inverse des manuels scientifiques, découvrent un organisme en 4 dimensions. Une manière attractive d'apprendre, et qui restera longtemps en mémoire.

    Troublante, philosophique, scientifique, et sociale, une exposition qui ne vous laissera pas de marbre.

     

    Human Bodies, actuellement en Espagne

  • Lucrèce Borgia au Théâtre des Célestins

     

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    Lucrèce Borgia. Italienne redoutable, dont le piédestal est juché sur un amas de cadavres exécutés pour mieux régner. Le sang que fait couler cette femme glaciale en devient la couleur de son habit royal. Une femme démoniaque, mais dont la fragile part d'humanité renaît sous nos yeux lorsqu'elle retrouve au carnaval de Venise, après vingt années de séparation, son fils eu d'une union incestueuse.

     

    Une femme. Un jeune homme. Un sol en damier, scène de tous les crimes et de tous les pêchés.

    La pièce débute par six hommes, crachant sur le nom et le destin des Borgia. Ou plutôt cinq hommes, l'un étant endormi à l'ombre de la terrasse. Cette première scène nous plonge d'emblée dans le quotidien du groupe de soldats, tant qu'on en deviendrait complice, acquiescant leurs véhémentes paroles. Et soudain, l'homme assoupi auquel on ne prêtait plus attention devient le sujet principal de la pièce. Pourquoi, une fois les soldats partis, Lucrèce Borgia en escale à Venise, est prise d'un haut le cœur poignant en découvrant le jeune Gennaro, en plein cœur de la ville ? Pourquoi se penche-t-elle, de tout son corps tremblant, sur ce minois d'adolescent, jusqu'à poser ses lèvres monstrueuses sur sa joue innocente ? Serait-ce sa prochaine proie ? Un secret hante alors cette pièce.

    Les Célestins nous dépeignent l'amour d'une mère emprise d'une animosité féroce. Elle est torturée par ces retrouvailles, et ne peut s'en cacher auprès de son mari qui croit alors qu'elle lui est infidèle. La lutte intérieure se retrouve également dans le personnage de Gennaro : que lui veut cette femme, magnifique, qui porte le terrible nom de Borgia ? Pourquoi le protéger alors qu'il la fuit comme la peste ? La pièce fait interagir des personnages torturés avec des personnages cyniques aux répliques amusantes afin d'alléger la trame dramatique qui pèse sur scène. Ainsi, Gubetta, un espion de la reine qui prend l'allure d'un soldat vieillissant auprès de ses jeunes compères nous permet de lier les situations représentées avec le contexte, légèrement caricatural, de l’Italie du XIXème siècle : "Il y a deux choses qu'il n'est pas aisé de trouver sous le ciel ; c'est un Italien sans poignard, et une Italienne sans amant.", ou encore ",le diable en sait plus que monsieur de Valentinois,et le pape Alexandre VI en sait plus que le diable.". Il nous permet d'affronter l'atrocité et l'angoisse portées par les personnages principaux.

    La comédienne Nathalie Richard incarne, et ce dès la première scène, la mort flottant au dessus de l'Italie gouvernée par cette même entité. Nous y découvrons une mort maligne, jouant de ses charmes auprès de son époux, une mort vengeresse lorsqu'elle condamne les cinq soldats pour avoir souillé sa personne, une mort qui entrevoit un semblant de justice auprès de Gennaro. Tant que Lucrèce Borgia est sur scène, la mort est sur tous les fronts. Et peut surgir d'une main autrefois pure et vaillante.

    La lumière, les comédiens, le décor, tout est mise en scène dans une harmonie somptueuse. Nous sommes plongés dans les entrailles de Ferrare, tant dans le figuré que dans les faits. La pièce durant 2h35, une entracte fut de mise. A mon goût, il aurait été préférable de ne pas en mettre, car le troisième acte contient tellement de scènes importantes que nous n'avons le temps de souffler, encore déconcentrés par la lumière du jour des quelques minutes auparavant. Mais la pièce en elle-même a été magnifiée par ce théâtre dont on ne fait plus la renommée.

     

     

    Lucrèce Borgia, au théâtre des Célestins du 16 au 25 mai 2014

  • Motopoétique au MAC de Lyon

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    La liberté est universelle. Et la recherche de cette sensation l'est aussi. Le MAC de Lyon présente une exposition centrée exclusivement sur la moto. Elle nous initie, que l'on soit simple amateur ou converti, à un univers sensible et poétique.

     

    Nous découvrons les entrailles de cet objet de culte dès le premier plateau d'exposition, disposées sur une table telle une salle opératoire. Nous parcourons sur trois étages les clichés et les expériences d'une série de personnes à travers différentes parties du globe, ayant comme point commun un fort attrait pour ce véhicule à deux roues.Nous sommes alors amenés au coeur du sujet et ce dès les premiers pas.

    Tout au long de l'exposition, nous voyons comment les différents artistes ont cherché à sublimer par touches personnelles tout ce qui se rapporte à la moto. Oeuvres tantôt prosaiques, avec des accessoires tels que les casques, les gants, les gilets, mais dans un décor toujours recherché. Tantôt aériennes par des vidéos hors des contraintes spatio-temporelles, en décalage avec le monde extérieur : une fois cramponné aux guidons d'une moto, l'homme est coupé de la réalité, du monde, de ses différences, et ne forme qu'un avec le paysage. En groupe, l'unité est la même. 

     

    Motopoétique aborde également d'autres sujets liés à ce domaine, tels que le type de la pin-up, jeune femme légèrement vêtue, qui devient le fantasme collectif de toute une génération de motards. On retrouve cela dans l'aviation des années 40 avec le noze art. Mais la moto, c'est également se soucier des autres, partir à l'aventure, s'oublier, tester ses limites, les enfreindre parfois. Il y a une vidéo des plus symbolique qui met parallèlement en scène un groupe de chanteurs de gospel afro américains et une femme sur une moto dans le désert. L'unité est de retour, retranscrite par des chanteurs en choeur et par cette personne qui se lie avec le sable qui frotte sur sa moto, de la force de leur voix et de la puissance du moteur, de ce sentiment que l'espace d'un instant, d'une minute, d'une heure, ils sont en vie.

     

    Motopoétique porte admirablement bien son nom. L'exposition définit l'art de s'échapper, de prendre la route, au sens propre ou en tant que conviction morale, en créant un univers autour d'un moyen de transport pour certains, et d'un art de vivre pour d'autres.