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Consumérisme

  • L'art et la machine au Musée des Confluences

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    On peut naître art et devenir machine. Être conçu machinalement et devenir des artistes. On a l'art d’apparaître au bon moment ou on industrialise les envies d'arts de nos parents. L'art, depuis la révolution industrielle, n'a cessé d'évoluer, a fasciné les époques comme ses maîtres de pensées. Les domaines du cinéma, de l'invention, de la peinture, de l'architecture, sont d'autant plus de réceptacles qui ont grandi et raviver cet amour étrange que l'on voue à la machine. 

    Le musée des Confluences rassemble près de 200 œuvres issues de 70 musées européens et nous invite à découvrir l machine dans ses heures de gloires et à ses courants délétères. 

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    Qu'est-il resté de l'art et de la machine ? Sommes-nous toujours fascinés ? Ou la tendance du dégout s'installe-elle dans nos croyances d'hommes aliénés et réduits ? Ce qu'il en ressort de cette exposition est que la machine intrigue, et donc pousse à la création, pour presque contrer l'inconnu en se l'appropriant. Elle irrite notre quotidien mais anime nos grands écrans, même lorsqu'elle prend des airs apocalyptiques (Matrix, I Robot...) ou que l'homme ironise son omniprésence (Charlie  Chaplin dans Les temps modernes). 
     
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    Deux visites espacées de deux mois m'auront été nécessaires pour me rendre réellement compte de la puissance de l'exposition. Ce que l'on peut appréhender comme un "assemblage sans âme" se reconsidère lorsque l'on découvre les ateliers, les œuvres mobiles, les conférences sur des thèmes bien précis, qui participent à l'exposition qui se déroule sur trois mois. L'art et la machine fait briller un musée qui jusque là ne m'avait pas convaincu. Beau mais creux, intéressant mais pompeux, rempli mais confus. 
    L'art et la machine répond enfin à un contemporain qui s'apprécie : là où les questions se posent sur notre présent et notre devenir, quand l'homme s’intéresse au construit, à la tradition, et essaye de s'en éloigner intelligemment. Et c'est dans le paradoxe de la fascination et de la haine que le corps de l'exposition se créé. On se promène donc entre les maquettes de De Vinci, aux prémices de l'aviation, et les sculptures futuristes de l'artiste Nam June Paik, puis on redécouvre la vague moderne de Duchamp et de son urinoir interprété par des artistes asiatiques. La machine convint donc les cultures, s'approprie les arts, qui la déteste (Souvenons-nous d'Erro au MAC en 2014) ou l'idéalise. Le point négatif de cette exposition serait dans la selection assez importante d’œuvres qui nous offrent peu de pistes d'interprétations, n'enlevant rien à leur beauté ou à leur graphisme, mais faisant davantage étale d'une pensée unique ou pour se dire que tel artiste était présent dans les murs des confluences. Egalement dans le choix, arbitraire ou non, de ne pas parler de la guerre, de la mort, de la maladie, de tout thèmes tabous et difficiles pourtant liés à la machine, par l'arme ou par le fil qui relie le malade au branchement de son soigneur. 
     
    La machine et l'art, l'art et la machine... Qu'importent les motivations qui poussent l'artiste à la création, l'objet mécanique ne cesse d'interagir avec l'art et tout deux se querellent pour innover avant l'autre. Quoi de mieux pour faire évoluer la société ? 
     
    L'art et la machine - Jusqu'au 24 janvier 2016
  • Appels entrants illimités au TNG

    Dans une perpétuelle dérision et absurdité se dessine dans les entrailles d'Appels entrants illimités des éclats de noirceurs sur notre condition d'homme. Nous rencontrons trois colocataires, perturbés, aiguisés, presque trop différents pour être réellement ensemble. Un grand, filiforme, qui se pose des questions sur l'humanité, les OGM, qui ne sait jamais quoi répondre lorsque la sonnerie du téléphone retentit et qui parjure la télévision. Un petite, un peu ronde, qui camoufle son hypersensibilité par des déguisements d'homard, de poule ou de jeune fille sûre d'elle. Et une dernière, le dernier lit de Boucle d'Or, banale dans son physique, quoique jolie et un vaniteuse, et irrémédiablement et dépressivement timbrée. Une horreur les rapproche : le monde extérieur, symbolisé sur scène par un tunnel morbide en papier blanc, qu'ils pénètrent toujours en cas d’extrême nécessité. On préférera même vaporiser les poubelles de sent bon plutôt que de les sortir et se confronter à leurs jugements, leurs étiquettes, leurs vies parfaites et bien rangées.

     

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    La pièce s'interrompt frénétiquement par des appels, ou plutôt des courtes phrases assemblées sans logique apparente, qui résument les informations quotidiennes qui nous sont projetés, les faits divers, la guerre, la corruption, le drameNous vivons dans un drame, et leur drame à eux est de trop le savoir. Louis, Anna et Charlotte nous racontent ainsi, avec leurs accents québécois si chaleureux, des petites histoires qui leur sont arrivés. On pense alors à de simples anecdotes, pour discuter, meubler leur refuge, mais nous y décelons des appels au secours. Les gens qu'ils rencontrent, les situations qu'ils vivent, nous cognent à notre conformité. Pourquoi faut-il savoir bien chanter pour monter sur la scène d'un karaoké ? Pourquoi se plier à un cadre qui ne nous est pas pas ajusté ? Pourquoi ne pas pouvoir penser et crier à la société que nous nous aimons, tels que nous sommes ? Ces spécimens voudraient l'amour mais ne reçoivent que des paillettes, du matériel sans âme et sans fond. Appels entrants illimités, c'est un peu résumer la folie et l’enchaînement incontrôlable des jours, des rencontres, des histoires, de notre vie.

    Par delà l'imagination débordante à en époumoner le spectateur qui tente de les suivre, nous en tirons notre propre aperçu de la pièce. Nous choisissons d'en saisir un certain sens, de prendre les bribes de ces dialogues, de choisir de les écouter ou de les comprendre, de se rappeler pourquoi nous sommes venus voir cette pièce, ou pourquoi nous sommes vivants.

    Un véritable chef d'oeuvre.

     

    Appels entrants illimités, mai 2015 au TNG

  • Omaha Beach

    Une ancienne plage de débarquement remplie de faux débris historiques, puisque retapés pour la gloire touristique. Lorsque nous longeons Omaha Beach, nous arrivons à prendre ce genre de clichés, qui glorifient une beauté rustique et naturelle. Capturer avec son smartphone dernière génération et s'improviser photographe du dimanche qui aime, sinon que de le croire intimement, laissé paraître qu'il est une âme sensible et cultivée, est devenue l'apanage de ces déserts de sens. Il est donc devenu parfaitement anodin de croiser, au détour d'un lieu au sombre passé, des troupes de touristes et des pancartes informatives aux langues internationales. Si la photographie d'un tank, qui recueillait des soldats entre la vie et la mort pour leur nation chérie et amnésique, rend cette expédition unique, c'est qu'ils ont réussi leur pari et nourri artificiellement les vaches maigres, normandes. Photographier au lieu d'y songer. Voir à travers 10 méga pixels pour ne plus s'arrêter, piégés par les aiguilles infernales. Ne plus l'imprimer dans nos mémoires, ne plus même l'imprimer sur du papier. Il ne manquerait plus que les œuvres dans les musées soient photographiées pour vite passer à autre chose et rejoindre Alice au café d'à côté. C'est l'engrenage huilé de nos têtes pensantes et vénales qui ne nous donnent même plus le temps de nous arrêter.

    Pour une beauté capitalisée.

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