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Art - Page 11

  • Lolita, Lumière de ma vie, feu de mes reins

    Lolita, Vladimir Nabokov

     

    Autre livre de l'été pour un tout autre genre.

    lolita.jpgLectrice avertie par l’éventuelle gène que ce livre pourrait occasionner, je me suis tout de même adonnée à la lecture du best seller du romancier russe. En effet, la quatrième de couverture est explicite : ces 500 pages qu'effleurent vos doigts propres et innocents ne sont pas moins que le récit de l'union incestueuse d'une jeune fille de 12 ans et de son beau père. Le roman se parcourt du point de vue interne, dans la peau d'Humbert, quadragénaire dont les traits anguleux et le regard noir ont un effet d'attraction quasi immédiate sur la gente féminine. Mais à part quelques relations insignifiantes qui n'ont qu'unique but de combler dans l'instant un manque affectif et relationnel cuisant, l’auteur est habité par un vice redoutable : une passion exacerbée pour celles qu'il appelle les nymphettes, ces jeunes filles encore marquées par l'enfance et à l'aube de leur féminité. Les préadolescentes de notre époque. Sa vie est donc en apparence tout a fait saine, car son vice n'est pas l'objet d'acte érotique sinon de brèves pensées au fil de ses journées.

    Jusqu'au jour où il rencontre Dolorès, intimement rebaptisée Lolita, jeune brunette fougueuse à la personnalité bien trempée. Il épouse donc sa mère qu'il conquiert aisément, lui permettant ainsi de vivre un amour interdit avec sa dulcinée. Si l'on se réfère au portrait bien plus aguicheur de Lolita que le cinéaste Stanley Kubrick met en scène en 1962, elle serait l'élément déclencheur de ce passage à l'acte, du dépassement de la frontière entre pensées et action. Mais il en résulte quelque chose de bien plus complexe. Une rencontre entre deux âmes solitaires totalement vidées par leur vie, entre un homme qui n'a jamais pu aimer et une jeune fille prisonnière de la cage dorée moralisatrice et restrictive de la haute société. Plus qu'une histoire faite d'expérience nouvelle, cette relation va devenir le bol d'oxygène qu'ils attendaient tous les deux. Le sentiment d'un drame imminent est alimenté par la succession des événements qui s'en suivront.

    Le roman, porté par une beauté de la syntaxe et un suspense retentissant, évite la perversion et le jugement. Cette écriture, qui rompt avec les tabous sociaux, humanise presque un narrateur qui tente de noyer sa culpabilité par des repentances adressées aux jurés de son subconscient. Lolita est un récit passionnant et puissant, à lire d'une traite et sans attendre.

  • Photographie, tout est photographie.

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    Une grande partie de notre vie est une série d'image.
    Oui, les instants que nous vivons, ou ceux que nous sommes en train de vivre, sont pour la plupart renseignés à l'état de photographies, spontanées, drôles, étranges, floues, neutres, atypiques, illégales, artistiques, et tant d'autres. Il est difficile de se dire, au moment même où nous appuyons sur le déclencheur, que ça y est : ce moment est figé dans le passé. Ce qui est anodin au début devient source de nostalgie dès lors que l'on s'y penche dessus à nouveau. Comment savoir si ces personnes seront toujours là, dans 10 ans ? Dans la vie active ? Lorsque j'aurais des enfants et une vie des moins festives ? Aurais-je toujours les traits qui me caractérisent aujourd'hui ? Deviendrai-je rousse, chauve par la maladie, ou encore vieille ? Vieille. Oui. Car c'est précisément ce qui affecte intrinsèquement cet art popularisé : la finitude. Au fond, nous avons à cœur de rassembler tous ces moments collectifs dans des puces électroniques ou des albums kitsch pour se conforter à l'idée que nous ne sommes pas rien, que notre vie n'est pas vanité. Les photographies nous prouvent le contraire. Nous avons existé, et ces photos existeront toujours, nous serons toujours jeunes, bien accompagnés, rieurs. Mais nous oublions parfois que celles qui ne sont perceptibles par autrui, et confinées dans une partie sensible de notre cerveau, forment les souvenirs les plus impérissables. Du moins, tant que la santé est là. 
  • Gallienne, le virtuose de la comédie française

     

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    "Les garçons et Guillaume, à table !". Avant même d'entrer dans la salle confinée du cinéma, je sens que l'originalité du titre n'est que l'introduction de ce qui va en découler. Et le miracle agit. Chacune de ces minutes portées par le brillant Guillaume Gallienne s'inscrit dans ce qui pourrait être le meilleur scénario de ces dernières années. Il pose sur écran une question paradoxale et épineuse : comment détourner les appréciations à notre égard alors que nous agissons conformément à ce que l'on attend de nous ? Tantôt sur les planchers du théâtre où la lumière éblouissante remplace le public, tantôt dans des décors richissimes et variés, l'acteur-scénariste nous livre avec émotion sa condition d'homme. Et sa condition de femme. On jubile, on s'esclaffe, on s'attache à ce personnage au parcours des plus atypiques qui l'a mené au métier d'acteur. Et quel autre rôle peut-on mieux interpréter que celui de notre propre vie ? A travers ses doubles - de sa mère, omniprésente, à l'impératrice Sisi - tout aussi hilarants qu'inquiétants pour la santé mentale du jeune homme, nous entrons avec un détachement assuré dans l'intimité de Guillaume Gallienne. Et le plaisir nous retient jusqu'au fermé de rideaux.

    Je vous conseille assurément de vous rendre dans votre cinéma de prédilection afin de découvrir cette dernière pépite française.

     

    Les garçons et Guillaume, à table ! actuellement au cinéma.