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  • Night Call de Dan Gilroy

    NIGHT CALL (1).JPGUne pluie de nominations, un casting prometteur et un thème sociétal excitant, tout semblait sourire à ce premier film de Dan Gilroy. Mais la sortie de salle nous laisse un gout de déception, de sujet pas ou peu exploité à sa juste valeur.

    Nous sommes introduits dans l'univers glauque des chercheurs de scandales, appâtés par le sang et le drame. Jake Gyllenhaal incarne Lou, un vautour redoutable aux intentions malsaines dont la soif pour l'argent et la reconnaissance le pousse aux portes de la folie. La brillante interprétation de l'acteur n'est cependant que l’enrobage doré de ce thriller remplit de lourdeurs. La mise en scène est telle que nous n'arrivons pas à nous identifier au personnage, nous suivons ses premières expériences avec la caméra et décrochons des sourires crispés lorsqu'il s'accopine avec l'humour noir. Mais plus les scènes défilent, plus la sensation de "regarder" le personnage s'installe. La comparaison avec le sublime Drive appuie cette impression, car l'esprit torturé et impénétrable de Ryan Gosling nous est accessible, de sorte à créer en nous de l'affection pour ce personnage. Night Call prend le parti de nous éloigner de son héros, davantage anti-héros, au profit de l'action à répétition. Sans grande originalité, la gravité des scènes paparazziées s’accroît jusqu'au grand final où l'inédit et l'ampleur du scoop propulse Lou à la gloire morbide d'une Amérique qui se goinfre de scandales. Des retournements de situations prémédités par tout bon public de ce genre cinématographique, des dialogues souvent absents au profit de courses de voitures clichées, cet amas de scènes classiques dont Dan Gilroy tente de mélanger à sa une sauce douteuse décrédibilise ce film qui aurait pu être merveilleusement bien construit. Pire, il trace le schéma manichéen de l'américain lambda qui subit les dérives de maniaques et des méchants médias qui le souille en s'abreuvant de tous ces faits divers. Cette réalité est sur exagérée et personnifiée par une quarantenaire peinturlurée qui donnerait son corps pour le scoop de l'année. 

    Night Call s'éloigne du thriller haletant que nous promettait Dan Gilroy mais se regarde par son acteur principal Jake Gyllenhaal qui domine ce long métrage, tant par son incroyable charisme que par un rôle dévoilant une maitrise de la noirceur, qui dénote des garçons gentillets qu'il a (trop) tendance à incarner. 

     

    Actuellement au cinéma

  • Yael tautavel ou l'enfance de l'art

    yael-tautavel-ou-l-enfance-de-l-art,--a-quai-des-arts,-mardi-16-mars,-a-20h--240.jpgYael est le petit dernier de la famille Tautavel, né sous la tragédie du Grand Exode : un jour, ou plutôt une nuit, tous les animaux ont déserté leur ile à cause de l'irrespect de l'homme. Quelque chose que nous n'avons jamais connu peut-elle nous manquer ? C'est à travers le regard de son grand frère, meilleur ami et guide, qu'il cultive la volonté de partir à la recherche de ces bêtes, les voir, les aimer, et les manger un peu. Le jeune garçon porte un regard pleins de malice sur ce voyage, qui prend une toute autre tournure : plus que la découverte d'un monde, il en devient la découverte de soi et de l'amour. L'amour de l'art pour l'un, l'amour d'une femme pour l'autre. Les mimiques enfantins et la voix nasillarde de Yael cachent des références poétiques aux problèmes actuels des jeunes à l'aube de leur vie d'adulte : comment s'épanouir dans un milieu incertain et face à des concepts encore bien troubles ? Yael se retrouve confronter au problème de l'amour, qui le nourrit dans ce qu'il aspire mais qui l'éloigne de son frère, qui n'a plus d'yeux que pour sa dulcinée. Le TNG s'amuse des doubles sens qui prêtent à sourire pour les plus grands : "où est ta mère ?" "Elle suce des pissenlits à la racine !" ou bien "Roméo va encore rentrer dans Juliette", qui se mélangent à des propos plus tendres lorsque Yael apprend de celui qui l'a initié à l'art : 

    "- Tout se peint Yael, absolument tout. Les taureaux, les dragons, le nuages, les pensées, les sentiments, les gens qu'on aime...

    - Même les gens qu'on aime et qui nous manquent ?

    - Surtout ceux-là.

    - Moi, si j'avais quelqu'un de prisonnier dans mon manque, j'aimerai bien pouvoir lui rendre la liberté."

    Le petit Yael grandit sous nos yeux et découvre qu'aimer, c'est apprendre à accepter que l'autre puisse aimer quelqu'un d'autre que soi, que l'amour se partage sans qu'il ne soit altéré. Il ne se divise pas mais se décuple, au fil de nos rencontres, de nos découvertes, et c'est une partie de son amour que Yael nous projette sur une toile suspendue au dessus du public par un lancé de peinture en direct sur un projecteur. 

    Cette pièce, débordant de spontanéité et de répliques à conserver, étonne par son franc parler. Elle illustre parfaitement l'enfance où l'on découvre l'amour et le partage, où nous sommes révoltés, rieurs, incompris, gourmands, sans gènes. Yael Tautavel ou l'enfance de l'art nous dit que nous ne pouvons vivre au dépend de quelqu'un d'autre toute notre vie, qu'il faut savoir prendre notre envol quand le moment est choisit. Et quoi de mieux que l'art pour nous servir de tremplin ?

     

    Yael Tautavel, décembre 2014

     

  • Hunger Games - La Révolte (partie 1)

    Nous quittions Katniss Everdeen en 2013 avec la foudroyante nouvelle de la disparition du district 12. 
    Que se passe-t-il, après que le monde qu'on nous avait façonné a disparu ? Se soumettre, se cacher, ou faire entendre sa voix ? Comment combattre ceux qui détiennent nos ficelles tout en se résignant à ne plus agir au péril de ses proches désormais saufs ? Katniss, meurtrie, va être utilisée comme un emblème révolutionnaire au dépend de sa volonté première.
    Les récentes nouvelles creusent une faille chez la gagnante, formant un accès exploitable pour les meneurs de la révolution. Manipulée et vernie d'une couche superficielle de bonnes intentions, la jeune fille ne semble être que la marionnette d'un combat entre méchants et gentils.
    C'est le tableau manichéen que nous dépeint le réalisateur : les dirigeants, aux cœurs de pierre et aux armes redoutables, et les résistants de l'ombre tentant de faire flancher le système établit il y a 75 ans. Cette facilité scénaristique tente de trouver du piment avec une approche plus psychologique qui contraste avec les deux volets précédents. En effet, le contexte fait que nous sommes davantage en proie à nous familiariser avec les sentiments de Katniss, qui semble plus mise à l'épreuve que jamais.
    Cet épisode soulève la question du manque. Lors des Hunger Games, le danger guettait perpétuellement Katniss mais celle-ci gardait une force déroutante, car son partenaire Peeta représentait une jauge d'énergie inépuisable tant qu'il restait à ses côtés. Étonnamment, nous n'arrivons toujours pas à nous identifier pleinement à ce personnage qui déambule dans les catacombes de son ancienne vie sans savoir comment aider toutes ces personnes souffrantes et en sachant qu'elle est le pion d'un jeu douteux. Il en est de même pour sa vie sentimentale, dans laquelle elle se perd entre l'envie de revoir celui qu'elle a appris à aimer et celui qui est à ses côtés. 
    Les tentatives d'atteindre psychologiquement l’héroïne ont donc porté leur fruit et nous laisse un gout amer de déception : qu'est-il arrivé à cette guerrière au cœur sur la main pour qui nous avions fait rouler une larme à la mort de Rue ou que nous avions soutenue dans son envie de détruire le terrain de jeu morbide du Capitole ?
    Les tournoiements de son esprit la ridiculisent presque et ne nous donnent plus vraiment envie de s’intéresser à son sort, malgré le suspense maladroit de la scène finale. Les penchants politiques de cette première partie instaurent un climat de guerre imminente et nous donnent l'impression que les talents des producteurs ont volontairement été étouffés pour nous réserver une fin haute en couleur. Le challenge est donc de taille pour la toute dernière partie de cette trilogie qui reste néanmoins captivante.