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Film - Page 8

  • Magic in the Moonlight, Woody Allen

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    C'est l'histoire d'un homme qui rencontre une femme. Non, c'est l'histoire d'un personnage suffisant persuadé qu'il n'y aucune forme de vie parallèle à la condition humaine et d'une charmante medium qui va tenter de lui donner un regard différent sur ce qu'il touche, sur ce qu'il voit, sur ce qu'il ressent. 

    Nous plongeons dans un univers cinématographique proche du milieu du siècle dernier pour suivre l'étrange affaire de Stanley Crawford, magicien de renom lorsqu'il est sur scène, qui en dehors des paillettes réfute toute sorte de magie. Celui-ci se rend, accompagné de son acolyte Howard Burkan, dans le sud de la France pour tenter de démasquer une jeune medium du nom de Sophie Baker à la beauté intrigante qui s'est liée avec les Catledge, famille de haut rang. Il y rejoint également sa tante, pour qui il porte une tendre admiration. Cependant, malgré les jours à cotoyer la voyante et à assister à ses rencontres avec l'autre monde, il n'arrive pas à déceler le truc, la supercherie que lui utilise dans ses spectacles. Comment cela est-il possible ? Existerait-il vraiment un "au delà" ? Le personnage de Stanley se déride au fil du film, il prend connaissance, au contact de la jeune fille, de la beauté qui l'entoure, du ciel étoilé dans l'observatoire de son enfance au parfum des roses rouges du jardin des Catledge qu'il avait pourtant traversé à maintes reprises. On pourrait penser que l'histoire va s'engourdir dans une suite mielleuse, mais l'écriture, la maitrise irréprochable de l'humour dans des dialogues et des situations absurdes et le cynisme qui rend le personnage de Stanley Crawford si attachant donnent du relief à l'histoire. Même si mademoiselle Baker possède de nombreuses cordes à son arc, elle se confronte à son plus grand étonnement à un homme qui ne se laisse pas si aisément berner, le dotant d'un charme qu'elle ne sait expliquer. Le cadrage, les tenues, les musiques apportent une ambiance particulière au film, que nous retrouvons par exemple dans Minuit à Paris sortit en 2011 qui plongeait Owen Wilson dans un Paris des années folles. 

    Puis, nous découvrons une sensibilité touchante chez Sophie Baker, jeune fille issue d'un milieu pauvre dont la mère souhaite créer une fondation. Elle n'a que sa jeunesse et ses grands yeux bleus pour s'en sortir. Duper des personnes qui n'ont plus que l'espoir est alors un stratagème imparable, car la persuasion dompte la bonne conscience. Mais cela ne la laisse pas de marbre, particulièrement depuis que Stanley Crawford entre dans le jeu.

    La magie est donc pour Woody Allen une inclinaison vers un optimisme à toute épreuve. Si nous savons que nous ne sommes condamnés, nous pouvons vivre tranquillement et profiter de l'infinité de choses à découvrir. Woody Allen, comme dans beaucoup de ses oeuvre, y retranscrit sa peur intime de la mort. Ses personnages rendent parfaitement compte que croire ou ne pas croire en Dieu, aux esprits, au paradis ou à la résurrection n'est pas le plus important. Croire en quelque chose qui est faux de nous rend pas stupide mais donne du sens à ce que l'on est. La magie, qu'elle soit réelle ou artificielle, apparaît comme le moyen de supporter davantage son existence et même mieux : d'en cultiver l'importance.

     

    Magic in the Moonlight, novembre 2014

  • Elle l'adore, de Jeanne Herry

    lacritiquerie-jeu-concours-elle_l_adore.jpgJusqu'où sommes-nous capable d'aller pour aider la personne que l'on admire ? 

    Muriel est une jeune femme vive, se plaisant à raconter des anecdotes en tout genre, esthéticienne, sans histoire. Une seule passion l'anime réellement : Vincent Lacroix, artiste dont elle suit minutieusement le parcours depuis vingt ans. Quand celui-ci vient sonner à sa porte, elle croit rêver. Qu'est-ce que cet artiste à qui tout sourit et dont le physique en fait chavirer des centaines comme elle sollicite son aide ? On croit tout d'abord à une comédie, à un film parfait pour se détendre un dimanche en bonne compagnie, puis on se retrouve, cœur serré, à suivre minutes après minutes le drame qui lie ces deux personnages. Lui, complètement perdu et obsédé par son image, elle, fragile aux tendances mythomane, vont tout mettre en oeuvre pour se cacher des soupçons de la police qui tendent dangereusement vers la vérité. Par quelques pirouettes, Muriel arrive à désarmer ses accusateurs. Sandrine Kiberlain, que j'avais tendance à trouver effacée voire niaise dans certains de ses précédents rôles, dévoile un talent remarquable. Elle réussit à nous faire rire par des réponses impulsives orchestrées par le stress, qui ont l'avantage de l'ôter du costume de meurtrière. Une femme a priori simple à la vie bien rangée nous surprend par son aisance à dérouter les membres du commissariat.

    Parallèlement, nous suivons la vie sentimentale des deux agents de police qui interrogent et tourmentent Muriel, qui ne daigne donner les réponses qu'ils souhaiteraient entendre. Le drame prend petit à petit de l'ampleur dans leur vie, réduit leurs nuits, les irritent, et des erreurs sont commises. Nous percevons comment la vie privée d'un individu, qui représente l'objectivité par son serment avec la loi, peut interférer avec sa vie professionnelle et corrompre certaines pistes. L'homme n'est jamais omniscient, juste, et unique sujet dans une histoire. Ainsi, certains éléments perturbateurs, que nous n'aurions jamais prédit car le hasard n'est qu'un pourcentage théorique, mène cette enquête dans une tournure arrangeante. Mais ce qui ravit l'autre peut entacher l'avenir de quelqu'un. 

    Mes jambes lâches et mes bras détendus se sont raffermis d'un geste brusque à la vue de la deuxième scène, qui se déroule dans le domicile du chanteur. Comment pouvons-nous réagir face à un accident ? Certains prendront une voie tandis que d'autres suivront le chemin opposé, c'est aussi ce que raconte Elle l'adore : nous ne sommes pas le parfait reflet de ce que les autres, et particulièrement ceux qui nous mettent sur un pied d'estale, pensent de nous. Notre vie et son extrême banalité subrepticement rompue par un événement peut nous forcer à entrevoir certaines possibilités. Et ce sont ces directives qui définissent qui nous sommes. Notre idole peut-elle nous décevoir ? Si vous espéreriez rester passifs devant une comédie simplette, attendez-vous à être happés par un scénario aiguisé enveloppé d'un suspense justement pesé.

     

    Elle l'adore, date de sortie 24 septembre 2014

  • Lucy, Luc Besson

     

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    "Notre capacité cérébrale est utilisée à 10 %, qu'adviendrait-il si on pouvait l'utiliser à 100 % ?" est la question à laquelle tente de répondre Luc Besson. Lucy est une jeune femme vive et banale qui se retrouve mêlée à un trafic de drogues rudement mené par une horde de japonais en colère, qui veulent récupérer la drogue qu'ils ont implanté en elle pour qu'elle la livre en toute discrétion. Mais ce sachet, contenant un kilos de petites billes bleues éclate lors d'une altercation avec une des personnes qui servent ce commerce. Tentant de comprendre ce qui lui arrive et de le faire savoir pour que ses connaissances soient partagées, Lucy se retrouve a endosser le rôle de policière au côté d'un homme plutôt charmant, dont elle se sert pour garder en elle une part d'humanité, qui passe par les sentiments.

    Sous des airs de documentaire scientifique axé sur la neurologie, nous suivons les cours de faculté orchestrées par le géant Morgan Freeman qui illustrent ce qu'il se passe dans le cerveau de la jeune femme au fur et à mesure que la drogue agit et dope son activité cérébrale dans des scènes parallèles. Le rôle de l'acteur n'atteint pas, ironiquement, le summum de son jeu d'acteur affadi pour un trop plein d'effets spéciaux. Cela nous donne jusqu'à l'impression qu'il a été voulu par le réalisateur non pas pour ses qualités mais pour son nom sur l'affiche. L'histoire prend une autre tournure aux deux tiers du film en résumant les événements marquants de notre humanité, jusqu'à ses origines avec la première vie humaine éponyme du film. Lucy aborde le consumérisme à la manière d'un 99 Francs futuriste, et piétine sur le terrain de Limitless, pourtant sortit récemment, qui a le mérite de contextualiser cette prise de drogue avec un écrivain subissant le syndrome de la page blanche. Luc Besson, pour sa part, se contente d'une petite arnaque en nous immisçant d'emblée dans ce conflit mafieusard assez tiré par les cheveux. J'accorde toutefois un bon point pour la tentative de représenter le monde sous rayon X, ce qui est assez novateur. Le reste est à découvrir par vous même si vous souhaitez passer un bon moment mais sans espérer découvrir le film de l'année.