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Film nominé - Page 3

  • Magic in the Moonlight, Woody Allen

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    C'est l'histoire d'un homme qui rencontre une femme. Non, c'est l'histoire d'un personnage suffisant persuadé qu'il n'y aucune forme de vie parallèle à la condition humaine et d'une charmante medium qui va tenter de lui donner un regard différent sur ce qu'il touche, sur ce qu'il voit, sur ce qu'il ressent. 

    Nous plongeons dans un univers cinématographique proche du milieu du siècle dernier pour suivre l'étrange affaire de Stanley Crawford, magicien de renom lorsqu'il est sur scène, qui en dehors des paillettes réfute toute sorte de magie. Celui-ci se rend, accompagné de son acolyte Howard Burkan, dans le sud de la France pour tenter de démasquer une jeune medium du nom de Sophie Baker à la beauté intrigante qui s'est liée avec les Catledge, famille de haut rang. Il y rejoint également sa tante, pour qui il porte une tendre admiration. Cependant, malgré les jours à cotoyer la voyante et à assister à ses rencontres avec l'autre monde, il n'arrive pas à déceler le truc, la supercherie que lui utilise dans ses spectacles. Comment cela est-il possible ? Existerait-il vraiment un "au delà" ? Le personnage de Stanley se déride au fil du film, il prend connaissance, au contact de la jeune fille, de la beauté qui l'entoure, du ciel étoilé dans l'observatoire de son enfance au parfum des roses rouges du jardin des Catledge qu'il avait pourtant traversé à maintes reprises. On pourrait penser que l'histoire va s'engourdir dans une suite mielleuse, mais l'écriture, la maitrise irréprochable de l'humour dans des dialogues et des situations absurdes et le cynisme qui rend le personnage de Stanley Crawford si attachant donnent du relief à l'histoire. Même si mademoiselle Baker possède de nombreuses cordes à son arc, elle se confronte à son plus grand étonnement à un homme qui ne se laisse pas si aisément berner, le dotant d'un charme qu'elle ne sait expliquer. Le cadrage, les tenues, les musiques apportent une ambiance particulière au film, que nous retrouvons par exemple dans Minuit à Paris sortit en 2011 qui plongeait Owen Wilson dans un Paris des années folles. 

    Puis, nous découvrons une sensibilité touchante chez Sophie Baker, jeune fille issue d'un milieu pauvre dont la mère souhaite créer une fondation. Elle n'a que sa jeunesse et ses grands yeux bleus pour s'en sortir. Duper des personnes qui n'ont plus que l'espoir est alors un stratagème imparable, car la persuasion dompte la bonne conscience. Mais cela ne la laisse pas de marbre, particulièrement depuis que Stanley Crawford entre dans le jeu.

    La magie est donc pour Woody Allen une inclinaison vers un optimisme à toute épreuve. Si nous savons que nous ne sommes condamnés, nous pouvons vivre tranquillement et profiter de l'infinité de choses à découvrir. Woody Allen, comme dans beaucoup de ses oeuvre, y retranscrit sa peur intime de la mort. Ses personnages rendent parfaitement compte que croire ou ne pas croire en Dieu, aux esprits, au paradis ou à la résurrection n'est pas le plus important. Croire en quelque chose qui est faux de nous rend pas stupide mais donne du sens à ce que l'on est. La magie, qu'elle soit réelle ou artificielle, apparaît comme le moyen de supporter davantage son existence et même mieux : d'en cultiver l'importance.

     

    Magic in the Moonlight, novembre 2014

  • Boyhood, de Richard Linklater

    boyhood-movie-poster.jpg12 ans. C'est le temps qu'il aura fallu au réalisateur Richard Linklater pour créer chez le spectateur un rapport intime avec les personnages qu'il voit réellement grandir sur l'écran. La première scène centre notre attention sur un jeune garçon, Mason, yeux plongés dans le ciel sous les notes saisissantes de Yellow du groupe Coldplay. Cet océan bleu introduit d'emblée cet infini, cette immensité, auquel est confronté l'être humain dès le plus jeune âge. Tous les champs d'actions possibles se déploient devant ses yeux écarquillés à la couleur avoisinant celle du ciel. Les années défilent et nous suivons la famille de Mason, une mère affectueuse séparée d'un père aux attentions nobles mais qui manque cruellement de maturité, et d'une soeur boute-en-train au caractère plus effacé l'adolescence venue. La vie professionnelle captivante de l'un, ou la passion stimulatrice de l'autre moduleront et forgeront leur caractère au fil des années.

    La mise en scène sensible et efficace fait subtilement défiler la bobine du film de leur vie. Le réalisateur met en parallèle les différentes époques représentées avec des éléments phares du XXI ème siècle, indicateurs temporels mais également clin d'oeil à une Amérique qui se démarque culturellement : l'élection de Barack Obama, le port des armes et l'initiation des plus jeunes, le phénomène Lady Gaga, ou encore l'essor du réseau social facebook. 

    Ces bribes de leur vie, en apparence anecdotiques et légères, forment une fois assemblées les raisons de décisions importantes, ou du chemin de vie de certains protagonistes. Chaque personnage porte un regard poétique et intelligent sur le monde dans lequel il évolue. Lorsque Mason, âgé d'une dizaine d'années, questionne son père sur l'existence des elfes et des créatures magiques, ce dernier répond honnêtement qu'ils sont une invention, et ajoute alors que pourquoi la baleine, par exemple, géant des mers et créature bien réelle, ne serait-elle pas magique ? En effet, si nous tournons notre regard différemment sur ce qui nous entoure, les hommes, les animaux, la nature, nous pouvons apercevoir toute la richesse et la beauté qui résulte en chacun d'entre eux. C'est une véritable bouffée d'optimisme que nous offre Linklater.

    12 ans après. Nous y sommes. Les enfants ont désormais atteint la majorité, pleins d'ambitions et de projets pour leur vie future. Et nous comprenons. Ce sont ces moments qui, à une année donnée, avec une personne donnée, dans un lieu précis, nous ont rendu vivant : révolté, incompris, amoureux, haineux, fier, libre, déçu, jaloux, passionné. Ce n'est pas l'obtention d'un diplôme qui nous rend nécessairement fier, ou l'indépendance financière qui nous octroie la sensation de liberté, mais tous les aléas de la vie et ces moments, ces instants à part, qui nous saisissent.

     

    Boyhood, été 2014 

     

  • Gallienne, le virtuose de la comédie française

     

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    "Les garçons et Guillaume, à table !". Avant même d'entrer dans la salle confinée du cinéma, je sens que l'originalité du titre n'est que l'introduction de ce qui va en découler. Et le miracle agit. Chacune de ces minutes portées par le brillant Guillaume Gallienne s'inscrit dans ce qui pourrait être le meilleur scénario de ces dernières années. Il pose sur écran une question paradoxale et épineuse : comment détourner les appréciations à notre égard alors que nous agissons conformément à ce que l'on attend de nous ? Tantôt sur les planchers du théâtre où la lumière éblouissante remplace le public, tantôt dans des décors richissimes et variés, l'acteur-scénariste nous livre avec émotion sa condition d'homme. Et sa condition de femme. On jubile, on s'esclaffe, on s'attache à ce personnage au parcours des plus atypiques qui l'a mené au métier d'acteur. Et quel autre rôle peut-on mieux interpréter que celui de notre propre vie ? A travers ses doubles - de sa mère, omniprésente, à l'impératrice Sisi - tout aussi hilarants qu'inquiétants pour la santé mentale du jeune homme, nous entrons avec un détachement assuré dans l'intimité de Guillaume Gallienne. Et le plaisir nous retient jusqu'au fermé de rideaux.

    Je vous conseille assurément de vous rendre dans votre cinéma de prédilection afin de découvrir cette dernière pépite française.

     

    Les garçons et Guillaume, à table ! actuellement au cinéma.