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Blog - Page 2

  • Night Call de Dan Gilroy

    NIGHT CALL (1).JPGUne pluie de nominations, un casting prometteur et un thème sociétal excitant, tout semblait sourire à ce premier film de Dan Gilroy. Mais la sortie de salle nous laisse un gout de déception, de sujet pas ou peu exploité à sa juste valeur.

    Nous sommes introduits dans l'univers glauque des chercheurs de scandales, appâtés par le sang et le drame. Jake Gyllenhaal incarne Lou, un vautour redoutable aux intentions malsaines dont la soif pour l'argent et la reconnaissance le pousse aux portes de la folie. La brillante interprétation de l'acteur n'est cependant que l’enrobage doré de ce thriller remplit de lourdeurs. La mise en scène est telle que nous n'arrivons pas à nous identifier au personnage, nous suivons ses premières expériences avec la caméra et décrochons des sourires crispés lorsqu'il s'accopine avec l'humour noir. Mais plus les scènes défilent, plus la sensation de "regarder" le personnage s'installe. La comparaison avec le sublime Drive appuie cette impression, car l'esprit torturé et impénétrable de Ryan Gosling nous est accessible, de sorte à créer en nous de l'affection pour ce personnage. Night Call prend le parti de nous éloigner de son héros, davantage anti-héros, au profit de l'action à répétition. Sans grande originalité, la gravité des scènes paparazziées s’accroît jusqu'au grand final où l'inédit et l'ampleur du scoop propulse Lou à la gloire morbide d'une Amérique qui se goinfre de scandales. Des retournements de situations prémédités par tout bon public de ce genre cinématographique, des dialogues souvent absents au profit de courses de voitures clichées, cet amas de scènes classiques dont Dan Gilroy tente de mélanger à sa une sauce douteuse décrédibilise ce film qui aurait pu être merveilleusement bien construit. Pire, il trace le schéma manichéen de l'américain lambda qui subit les dérives de maniaques et des méchants médias qui le souille en s'abreuvant de tous ces faits divers. Cette réalité est sur exagérée et personnifiée par une quarantenaire peinturlurée qui donnerait son corps pour le scoop de l'année. 

    Night Call s'éloigne du thriller haletant que nous promettait Dan Gilroy mais se regarde par son acteur principal Jake Gyllenhaal qui domine ce long métrage, tant par son incroyable charisme que par un rôle dévoilant une maitrise de la noirceur, qui dénote des garçons gentillets qu'il a (trop) tendance à incarner. 

     

    Actuellement au cinéma

  • Les oiseaux ne chantent plus

    Essai

    J'ai toujours eu une attirance envers la douleur. Petit garçon, je m'amusais à coller furtivement ma langue contre la pile de la télécommande de chez mémé, confortablement installé dans son clic clac des années 90, aux tâches de café séchées par le temps et à l'odeur indescriptible de personne âgée. Cela apportait quelques couleurs aux émissions soporifiques des dimanches après-midi. J'avais 6 ans. Ce fut le début d'expériences tout aussi bêtes que dangereuses : tester les fils électriques sous hautes tension, escalader à mains nues les falaises qui longeaient l'unique route de ma maison de vacances, peignant mes paumes d'un violet nuancé dans lequel je trouvais une certaine forme d'art et de satisfaction. Avec la quinzaine arrivèrent les premiers tatouages à l'ancre de chine aujourd'hui bavures noires et illisibles retraçant une amourette adolescente et l'essai de quelques dessins tribaux sans grande originalité. Il va s'en dire que je n'étais pas le plus tendre à la cour de récrée. Des problèmes, on m'a a cherché peu, des poings, il s'en est distribué des centaines. Je me délectais de la sensation de mes phalanges qui s'éclatent d'un son roque et puissant contre la joue rose d'un benêt trop prétentieux. Il m'en fallait plus. Mais je devais jouer dans la subtilité, pour ne pas finir marginal ou bien cloîtré entre quatre murs.

    C'est donc tout naturellement que je suis tombé amoureux de Mathilde, jeunette blonde foncée aux quelques tâches de rousseur, la vingtaine superbe, qui m’entraîna dans les profondeurs de son foutu univers. Les débuts furent très difficiles. Nous nous gavions de dîners aux chandelles, nous saoulions de soirées mondaines, et rencontrer ses amis était l'assurance d'une personne de plus sur terre à mépriser. Nous déblatérerions des mots d'amours et des surnoms ridicules à concurrencer le gang des demoiselles naïves de ce cher Walt qui s’éprennent du premier venu dès lors que coule en lui un sang royal. A vomir. Puis notre relation s'est peu à peu améliorée. J'alimentais mon monstre intérieur d'insultes et de bagarres puériles, qui, se cognant contre mes tympans, adoucissait la tempête de mon esprit. Mais  je revenais toujours à la charge. Je recommençais à fréquenter la source de mon malheur, celle qui me coupait le souffle et me retenait, par ses griffes peintes de rose, dans une histoire vouée à ma destruction. C'était donc ça, ce sentiment avec un grand A qui obnubile nos conversations, nos écrans télévisés, nos romans à succès ? Mais je ne voulais pas de tout ça, de toute cette mascarade hollywoodienne.

    Je voulais sentir.

    La douleur de ressentir une caresse, la douceur d'éprouver un coup.